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LE SABBAT NORTON

M. Auguste Burdeau se leva. Le bras tendu, livide de son cœur désordonné dont il allait bientôt mourir, il flétrit au milieu d’une immense émotion son accusateur.

Sturel, des galeries, regardait avidement cette cuve où tous ses espoirs achevaient de s’anéantir. Comme la Chambre applaudissait ! Nelles surtout frappa le jeune homme qui savait sa haine de Clemenceau ; emporté par la peur et pour que le ressuscité le vît, il claquait des mains au-dessus de la tête ; on eût dit d’énormes oreilles d’âne balancées.

Un tourbillon d’injures, un cyclone prend Millevoye sur la tribune, le porte hors de la Chambre. Pour lui, momentanément, tout est perdu (hormis l’honneur). C’est l’espada qui, manquant le taureau, se fait siffler par tout le cirque et détourne de son quadrille la faveur publique.

Assurément, dans cette séance, le beau coup fut fourni par une autre bande que la « bande boulangiste ». Ce fut même un coup d’une telle habileté que les aficionados le devront admirer tant qu’il existera un art parlementaire et un art policier. Coup d’escamotage : la part de vérité s’était évanouie brusquement dans ce tourbillon d’imprudences et d’insanités. Et pourtant il y avait une part de vérité !

Trois mois plus tard, dans le cabinet du juge d’instruction, Norton dira :