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DES ÉCLAIRS DANS LES TÉNÈBRES

fâcheux dans certains marchés de café en tablettes pour l’armée ».

L’influence parlementaire du baron de Reinach tenait le plus souvent à des secrets surpris, à des complicités antérieures. Il ne la vendait si cher qu’en faisant comprendre à ses acheteurs que refuser ses services, c’était s’assurer son hostilité. À ce chantage, il joignait l’escroquerie. De 1886 à 1889, le baron encaissa de la Compagnie de Panama six millions. Cette somme énorme, la lui donnait-on de plein gré ? On en jugera sur un trait. En 1888, le baron de Reinach dit à M. Cottu, administrateur de la Compagnie de Panama : « Le Panama est contrecarré par le Crédit Foncier qui veut conserver le monopole des obligations à lots. Eh bien ! je vous apporte l’alliance du Crédit Foncier, moyennant 750,000 francs à verser au gouvernement. Oui, M. Floquet a besoin de 750,000 francs sans plus de retard, et je suis chargé de vous les demander. Si vous consentez, on maintiendra M. Christophle, à condition qu’il accepte une entente avec vous ; ou bien, on imposera cette entente à son successeur. » M. Cottu se récria ; on avait déjà beaucoup abusé de la Caisse du Panama ! 750,000 francs, c’était un gros chiffre ! D’autre part l’accord avec le Crédit Foncier le tentait. « Enfin, conclut-il, il faut me mettre en présence du président du conseil. » Le lendemain matin Reinach venait