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Page:Barrès - Le culte du moi : un homme libre.djvu/114

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UN HOMME LIBRE

le bon sens, sinon pourrais-je le fréquenter ? Mais les soins dont j’entoure la culture de ma bohème morale, c’est à sa tenue, à son confort, à son dandysme extérieur qu’il les prodigue. Vous ne sauriez croire quel orgueil il met à trancher dans les questions de vénerie ! — Hé ! direz-vous, que fait-il alors dans cette retraite ? — En vérité, je soupçonne parfois qu’avec plus de fortune il ne serait pas ici.

Ces petites réflexions où, pour la première fois, je me différenciais de Simon, je ne les lui communiquai pas. Pourquoi le désobliger ?

Benjamin Constant l’a vu avec amertume. Deux êtres ne peuvent pas se connaître. Le langage ayant été fait pour l’usage quotidien ne sait exprimer que des états grossiers ; tout le vague, tout ce qui est sincère n’a pas de mot pour s’exprimer. L’instant approche où je cesserai de lutter contre cette insuffisance je ne me plairai plus à présenter mon âme à mes amis, même à souper.

J’entrevois la possibilité d’être las de moi-même autant que des autres.

Mais quoi ! m’abandonner ! je renierais mon service, je délaisserais le culte que je me