CHAPITRE PREMIER
LE LYCÉE DE NANCY
En octobre 1879, à la rentrée, la classe de philosophie du lycée de Nancy fut violemment émue. Le professeur, M. Paul Bouteiller, était nouveau et son aspect, le son de sa voix, ses paroles dépassaient ce que chacun de ces enfants avait imaginé jamais de plus noble et de plus impérieux. Un bouillonnement étrange agitait leurs cerveaux, et une rumeur presque insurrectionnelle emplissait leur préau, leur quartier, leur réfectoire et même leur dortoir : car, pour les mépriser, ils comparaient à ce grand homme ses collègues et l’administration. Ce bâtiment d’ordinaire si morne semblait une écurie où l’on a distribué de l’avoine.
À des jeunes gens qui jusqu’alors remâchaient des rudiments quelconques, on venait de donner le plus vigoureux des stimulants : des idées de leur époque ! Non pas des idées qui aient été belles, neuves et