Page:Barrès - Les Diverses Familles spirituelles de la France, 1917.djvu/184

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pour la dernière fois se serrèrent. Et quand, d’un geste fort, elles se furent quittées, nous ne dîmes plus aucune parole. L’instant était trop solennel, sa gravité m’étreignait. Pourtant je ne tentai pas de m’en délivrer par un au revoir cordial, gaiement jeté en me retournant ; il eût sonné trop faux et m’eût fait encore plus mal.

» Et ce que je te conte, je te jure que je ne me laisse pas aller à le revêtir de la tristesse qui depuis s’est jetée sur le souvenir. Je savais la résolution de mon ami, sa valeur, ce que m’avaient dit de lui ses compagnons d’armes et enfin le rôle de son régiment dans l’action imminente, rôle de premier plan et du plus grand danger… »

Telle est cette vie. Son effet général est triste. Brève et brillante, elle frappe l’esprit d’une manière presque douloureuse par une succession rapide d’images intenses. Lagrange cherchait des orages, lui fussent-ils funestes. Ses amis m’ont donné