Page:Barrès - Les Diverses Familles spirituelles de la France, 1917.djvu/242

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sante et tendre, c’est le dogme traduit en charité et sentiment, c’est un bon et délicieux enfant qui dit à Dieu : « Je suis à toi et aussi à tous mes frères ». Avec ses dix-huit ans et couvé dans cette chaleur de religion, il va mêler sa piété à toute sa vie si brève de guerre. Chez ce petit saint calviniste, le rêve prend une forme tout à fait singulière, mais où fermente l’ardeur commune à tous ces jeunes soldats de créer une France plus belle.

Ma préoccupation essentielle, dit-il, est celle de la légitimité de cette guerre. J’ai confiance que notre cause est juste et bonne, et que nous avons le droit pour nous. Mais il faut que cette guerre soit féconde, et que de toutes ces morts jaillisse une vie nouvelle pour l’humanité.

Je songe sans cesse à la France de demain, à cette jeune France qui attend son heure. Il faut qu’elle soit une France consacrée, où chacun n’aura qu’une raison d’être, le Devoir. On ne vivra qu’en tant qu’on connaîtra son devoir et qu’on luttera pour l’accomplir. Et c’est à nous, protestants, ou plutôt à nous, « croyants », qu’il appartient de révéler cette vie nouvelle au monde.