Ajalbert, d’Esparbès, Tailhade, Willy, Paul Adam,
Rachilde, Dumur, Charles Morice. Moréas y écrit aussi.
Mais ses vers et ses proses n’ont encore rien de très symboliste.
Les articles insérés par Lutèce traduisent surtout
l’influence de Baudelaire et de Poe. La plupart ont des
titres extraordinaires ou macabres. Le journal est sans
doute sympathique aux Jeunes, mais il tient les symbolistes
en secrète défaveur. Le numéro 140 du 18 septembre au
5 octobre 1884 contient une étude signée L. T. (Léo Trézenik)
contre Songes, le meilleur livre de Poictevin. C’est avec
une certaine complaisance aussi que le numéro 257, du 3 au
10 octobre, reproduit un article de l’Autorité intitulé Maboulescents,
article véhément dans lequel Moréas, Mallarmé,
Poictevin, Ghil, Rimbaud sont traités de fous et où l’on
demande pour eux une loge à Charenton. Ce même mois,
d’ailleurs, les symbolistes réussissent à provoquer une scission
dans la rédaction de Lutèce. Les anciens directeurs,
Trézenik, Rall, Henry Maugis démissionnent. Le journal
transporte son siège 16, boulevard Saint-Germain, et la nouvelle
direction fait dans son programme une place plus considérable
aux décadents. Henri de Régnier, Ernest Raynaud,
Vignier y pénètrent alors. Ils s’y montrent partisans d’une
poétique nouvelle sans doute, mais d’où les réformes trop
brutales sont exclues. Le journal ne tarde pas du reste à
réduire son format et à disparaître.
7. La plupart des rédacteurs passent à la Revue indépendante à laquelle travaillaient déjà parallèlement bon nombre d’entre eux. Cette revue, jadis politique, littéraire et artistique, renaissait précisément, avec un programme unique de littérature et d’art, d’un deuxième naufrage. Un jeune politique avait d’abord en effet assumé les frais de l’entreprise. La Revue indépendante, alors revue mensuelle de 84 pages in-12, installée au 7 de la rue Médicis, avait pour rédacteur en chef Félix Fénéon et pour principaux collabo-