Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/138

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vous achetez quelque chose que vous n’aimez pas et dont vous regretterez longtemps le choix.

Décidée à ne pas me faire berner, j’entre l’autre jour dans un magasin et j’expose d’une manière catégorique ce dont j’ai besoin :

— Avez-vous, dis-je, une étoffe de tel genre ? Celle-là, pas d’autre.

— Oui, madame, me répond-on avec empressement. Et l’on me conduit à un siège où l’on m’installe avec forces civilités.

Le commis commence à tirer les étoffes des rayons, lainages carreautés, rayés, à grands et à petits ramages, tout y est, excepté, comme de juste, ce que j’avais spécifié.

Vous me croirez si vous voulez, mais sur six magasins, bien comptés, que j’ai parcourus, en répétant partout la même demande aussi explicitement faite, il n’y en a eu qu’un seul où l’on m’ait répondu tout de suite :

— Nous n’avons pas ce que vous demandez.

Dans tous les autres, on m’a promenée de comptoir en comptoir, vantant ceci, prisant cela et me faisant perdre un temps considérable que j’aurais pu mieux employer ailleurs.

Je ne connais pas le système que l’on adopte dans quelques magasins, mais, j’ai dû conclure en plusieurs cas, d’après l’insistance des commis auprès des acheteurs, que plus les ventes étaient nombreuses, plus ils étaient rémunérés.

J’ai rencontré, samedi dernier, une jolie fillette de ma connaissance, qui s’en allait prestement, le nez au vent, dans la rue.

— Venez-vous avec moi ? me dit-elle ; j’ai à faire l’emplette d’un manteau de printemps, et vous m’aiderez à choisir. Ce sera très amusant.

— Amusant ? hum ! pensai-je. Vous m’en direz des nouvelles à la fin de la journée, ma toute belle.

Tout de même, je me joignis à elle, et nous avons commencé ensemble notre tournée.