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Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/285

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Il y a d’étranges unions sur cette pauvre terre. La disparité qui existe entre les parties contractantes est tellement flagrante qu’elle frappe les plus indifférents.

Combien d’hommes d’esprit qui épousent des sottes ! combien de femmes intelligentes qui se marient à des ignorants ! ce sont de ces choses qui se passent tous les jours et dont on a même cessé de s’étonner.

C’est Talleyrand qui disait : « On ne sait pas tout le bonheur que l’on éprouve à se faire aimer par une bête. » Mais il n’est pas donné à tous de prendre son sort avec le froid cynisme du fameux diplomate.

De nos jours, où les mariages d’inclination sont si rares, étant remplacés par des mariages de convenance, dits de raison, — ou des mariages d’argent, les plus ignobles de tous, on s’écrie volontiers, pour se donner le change : L’amour vient après le mariage !

Je ne m’y fierais pas. Il pourrait venir, en effet, mais, par une étrange méprise, allumer le feu sacré sur un autel étranger, et alors….

J’ai vu, il y a quelques mois, chez un marchand de tableaux, une peinture qui m’a fait longuement réfléchir.

Ce tableau représentait une maison dont les contrevents étaient soigneusement clos, et la porte fermée par une énorme serrure.

Tout en bas, sur le perron, un petit amour, flèches et carquois sur l’épaule, frappait vainement pour se faire ouvrir, et au-dessus de la porte, on lisait sur une pancarte :

Fermé pour cause de mariage.

Lundi, 18 février.

Je constate que les femmes ont fait, depuis un an ou deux, un grand pas vers… — je ne dirai pas vers le progrès, parce que cela ne serait pas poli, — disons plutôt un grand pas vers l’indépendance.