Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/315

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— Vos cheveux sont couleur de nuit
Et vos yeux sont couleur de rêve…

murmura-t-il comme pour lui-même.

— C’est joli ce que vous dites là, ce sont des vers, n’est-ce pas ? J’adore la poésie et je voudrais bien être poète.

— Vous êtes mieux que cela, vous êtes tout un poème.

Marielle rougit

— Si vous voulez que nous soyons amis, dit-elle vivement, il ne faut pas me faire de compliments. Vous croyez sans doute qu’ils me font plaisir, mais je vous assure que non.

Elle était si jolie, si naïve, avec ce petit air sérieux et grave où perçait déjà la précoce maturité de la femme, qu’il se sentit tout ému, et son cœur, si froid, si indifférent jusqu’à cette heure, se sentit réchauffé par une tendresse profonde.

— C’est entendu alors, nous sommes amis, reprit-il, n’allez pas l’oublier.

C’était un peu hardi à elle de parler d’amitié à cet étranger ; cependant, elle lisait sur son visage tant de franchise et de loyauté, qu’elle se sentit tout de suite portée vers lui comme vers un frère.

D’ailleurs, ne fallait-il pas être la plus aimable possible pour ce généreux donateur qui s’intéressait tant à la cause de l’hôpital. Son amie, tout à l’heure, lui avait même dit qu’elle pourrait flirter, mais, cela, oh ! non, elle ne le ferait pas.

Ils causèrent longuement, en faisant le tour des salles ; ils montèrent à la galerie des beaux-arts, où il lui dit de si belles choses sur la peinture qu’elle crut entendre Raphaël lui-même.

Puis ils prirent une tasse de brûlant moka dans le joli salon de lady Lacoste, où tous les coins ressemblent à des nids d’amoureux.

Elle lui parla de son couvent, qu’elle venait de laisser, de ses frères, qui la taquinaient, parce qu’elle était trop