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grâces et de qualités qui l’avait vouée éternellement au célibat.

La pauvre n’était plus alors qu’un objet de ridicule. Manifestait-elle un désir, « Caprice de vieille fille ! » disait-on autour d’elle. Montrait-elle un peu d’humeur, fût-ce même pour les motifs les plus légitimes, « Grincheuse comme une vieille fille ! » s’écriait-on de toutes parts.

Jadis, à vingt-trois ou vingt-quatre ans, le préjugé populaire commençait à marquer d’un stigmate la femme non mariée. À vingt-cinq ans, c’en était fait. Avec la première épingle dans la coiffe de sainte Catherine, son triste sort était fixé.

La « vieille fille » alors commençait à se vêtir de vêtements plus sombres, à ne plus prendre part aux bals et aux fêtes, sous peine de voir le vide se faire autour d’elle comme autour d’une lépreuse.

Il n’y avait qu’un type de convention pour la désigner : nécessairement, la vieille fille devait être anguleuse, fanée, laide, désagréable de caractère, le cœur rempli de fiel et faisant sa nourriture quotidienne de thé et de scandales.

À toutes ces qualités on ajoutait le désir immodéré de courir à la conquête d’un mari, et les rires, les quolibets, les plaisanteries pleuvaient sur la malheureuse avec un ensemble qui ne se démentait jamais.

Aujourd’hui, si « nous n’avons pas changé tout cela, » des idées nouvelles ont singulièrement amélioré la situation.

Qui oserait, de nos jours, appliquer l’épithète de « vieille fille, » dans son sens injurieux, à cette classe de femmes, fraîches encore, gaies, actives en dépit de leur vingt-cinq ans.

Le préjugé recule les limites de son amnistie jusqu’à trente et trente-cinq ans, et, qui sait si, avec les générations qui vont suivre, le mot ne viendra pas à disparaître complètement.

À quoi cela est-il dû ? Au souffle d’indépendance qui a passé sur le monde. De nos jours, la femme qui ne se