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que de détruire, fidèles aux instructions d’un grand pape qui leur avait dit, en les envoyant aux Gentils : « Retrancher tout, à la fois, dans ces esprits incultes, est une entreprise impossible, car qui veut atteindre le faite doit s’élever par degrés et non par élans... Gardez-vous donc de détruire les temples ; détruisez seulement les idoles, et remplacez-les par des reliques[1]. »

Les missionnaires, loin de les détruire, transportèrent donc la forme, le rhythme, la méthode élémentaire, toute l’enveloppe païenne du chant druidique dans la contre-partie chrétienne ; l’enseignement seul fut changé par eux. L’apôtre emprunte au Druide son système pour le combattre. Si l’un tire de ses poèmes sacrés la doctrine qu’il inculque à ses disciples, au moyen des douze premiers nombres douze fois répétés ; l’autre, adoptant les mêmes chiffres, attache à chacun d’eux une vérité tirée de l’Ancien ou du Nouveau Testament appropriée au sujet, et que les jeunes néophytes retiendront aisément par l’effet des répétitions. Les douze points qu’il enseigne sont : qu’il y a un Dieu, deux Testaments, trois grands prophètes, quatre évangélistes, cinq livres de Moïse, six cruches aux noces de Cana (souvenir du premier miracle de Jésus-Christ), sept sacrements, huit béatitudes, neuf chœurs d’anges, dix commandements de Dieu, onze étoiles qui apparurent à Joseph ; enfin, douze apôtres.

Comme dans le breton, le disciple interroge le maître, qui, à chaque nombre nouveau, répète en sens inverse les nombres précédents, savoir : le deux et l’un après l’unité ; le trois, le deux et l’unité après le trois ; le quatre, le trois, le deux et l’unité après le quatre, et ainsi de suite jusqu’au bout, où il reprend les douze nombres, sans s’arrêter, toujours en sens inverse.

Voici, du reste, le texte latin :


— Dic mihi quid unus ?

— Unus est Deus
Qui regnat in cœlis.

— Die mihi quid duo?

— Duo sunt testaments,
Unus est Deus
Qui regnat in cœlis.


  1. Gregorii Opera, lib. XI, epist. 76 ; ibid., lib. IX, epist. 74.