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instinctivement en une de ces chansons de danse improvisées, véritable ballade antique, malheureusement trop rares aujourd’hui.

Un maître meunier, qu’on me dit être le plus célèbre chanteur de noces des montagnes, menait le branle et la chanson ; pour collaborateur, il avait son garçon meunier, sept laboureurs, et trois chiffonniers ambulants. Sa méthode de composition me donna une idée exacte de celle des improvisateurs bretons. Le premier vers de chaque distique de la ballade une fois trouvé, il le répétait à plusieurs reprises ; ses compagnons, le répétant de même, lui laissaient le temps de trouver le second, qu’ils reprenaient pareillement après lui. Quand un distique était achevé, il commençait généralement le suivant par les derniers mots, souvent par le dernier vers de ce distique, de manière que les couplets s’engrenaient les uns dans les autres. La voix ou l’in-spiration venant à manquer au chanteur, son voisin de droite poursuivait ; à celui-ci succédait le troisième ; puis le quatrième continuait, et tous les autres ainsi de suite, à tour de rôle, jusqu’au premier, à qui la chaîne recommençait.

Comparant les Bretons trompés dans leurs espérances à un père devenu fou qui berce en chantant son enfant mort depuis longtemps, le maître meunier des montagnes débuta de la sorte :