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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

œuvrement. Je peins et je lis, mais ce n’est pas assez.

Pour une vaniteuse comme moi, il faut s’attacher à la peinture, car c’est une œuvre impérissable.

Je ne serai ni poète, ni philosophe, ni savante. Je ne puis être que chanteuse et peintre.

C’est déjà joli. Et puis, je veux être à la mode, c’est le principal.

Esprits sévères, ne haussez pas les épaules, ne me critiquez pas avec une indifférence affectée. Pour être plus justes, vous êtes les mêmes au fond ! Vous vous gardez bien de le laisser voir, mais cela ne vous empêche pas de savoir dans votre for intérieur que je dis vrai.

Vanité ! Vanité ! Vanité !


Le commencement et la fin de tout et l’éternelle et la seule cause de tout.

Ce qui n’est pas produit par la vanité est produit par les passions. Les passions et la vanité sont les seuls maîtres du monde :


Jeudi 6 avril. — Je suis venue à mon journal, le priant de soulager mon cœur vide, triste, manqué, envieux, malheureux.

Oui, et moi avec toutes mes tendances, avec tous mes immenses désirs et ma fièvre de la vie, je suis toujours et partout arrêtée comme un cheval est arrêté par le mors. II écume, il rage et se cabre, mais il est arrêté.


Vendredi 7 avril. — Je suis tourmentée. Oh ! que l’expression russe : « Avoir un chat dans le cœur » est juste ! J’ai un chat dans le cœur.