Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/50

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
45
DE MARIE BASHKIRTSEFF.

comme un bébé, ce qui est trės gracieux quand on est mince et bien faite. Les neuds blancs sur les épaules, le cou et les bras nus me faisaient ressembler à une infante de Velasquez. Mourir ?… Ce serait absurde, et pourtant il me semble que je vais mourir. Je ne peux pas vivre ; je ne suis pas créée régulièrement, j’ai un tas de choses de trop, puis un tas qui manquent, et un caractère qui ne peut pas durer. Si j’étais déesse et si tout l’univers était à mon service, je trouverais le service mal fait. On n’est pas plus fantasque, plus exigeante, plus impatiente ; quelquefois, ou peut-être même toujours, j’ai un certain fonds de raison, de calme, mais je ne m’explique pas bien, je vous dis seulement que ma vie ne peut pas durer. Mes projets, mės espérances, mes petites vanités écroulées !… je me suis trompée en tout !

Mercredi 13 février. il me semble qu’il va m’arriver quelque malheur, comme si j’avais fait quelque chose de mal et en craignais les suites ou quelque injure. Je me fais pitié, mais j’ai comme peur. Maman se rend tout à fait malheureuse par sa faute ; il y a une chose que je la prie et supplie de ne pas faire, c’est de ne pas ranger mes affaires, de ne pas mettre en ordre mes chambres. Eh bien, quoi que je dise, elle le fait avec une obstination qui est comme une maladie. Et si vous saviez comme c’est exaspérant et comme cela augmente mes impatiences et mes façons brusques de parler, qui n’ont pas besoin d’étre augmentées !

Je crois qu’elle m’aime beaucoup, je l’aime beaucoup aussi, mais nous ne pouvons pas rester deux Mon dessin ne va pas et