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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

fera gagner énormément, parait-il, à mes figur es que je ne dois plus toucher, sauf deux yeux à faire un peu moins noirs.

C’est un travail de deux heures. Je devrais être folle de joie, mais je ne le suis pas, parce que je nę partage pas l’opinion demon excellent maitre. Je puis faire mieux… Ge que j’ai fait n’est. donc pas bien ? pas assez… je vois mieux, je devrais faire comme je vois.

Que dira le public ? Est-ce une chose qui sera remarquée ? Comment savoir ? Il trouve que c’est bien. Ne l’envoyez pas à Nice, gardez-le pour Paris. — 11 dit que c’est bien, les bien sont relatifs, et d’un bien relatif je n’en veux pas. C’est bien pour un autre, mais pour moi, mais pour tout le monde ? Est-ce fort ? Il trouve le petit bonhomme de dos.parfaitement dessiné, on sent, dit-il, ses petites jambes à travers le pantalon, il est campé et tout…

Il croit peut-étre que j’ai pensé aux malices anatomiques. J’ai

copié la nature sans songer à rien ; du reste, il me semble que le talent est inconscient. Samedi 6 octobre.

J’ai lu un roman de notre illustre Tourgueneff, tout d’une traite et en français, pour me rendre compte de l’impression des étrangers. C’était un grand écrivain, un esprit très subtil et un analyste très fin ; un poète, un Bastien-Lepage. Les paysages sont. aussi beaux et il décrit les moindres sentiments comme les peint Bastien-Lepage. Quel sublime artistel Millet ! Eh bien, il est aussi poétique que Millet ; je dis cette phrase inepte pour les imbéciles qui ne comprendraient pas autrement.