Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/558

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
553
DE MARIE BASHKIRTSEFF.

sont devenues jaunes (sur le tableau) ; j’y avais fourré de l’huile, mais aussi je suis idiote, j’ai raccommodé ça ; nous verrons. Mais il faut le finir ce tableau ; avec le Salon, les journaux, la pluie, H… et toutes ces bêtises j’ai perdu vingt-cinq jours ; c’est insensé mais c’est fini.

Ma médaille se vote aujourd’hui, il est quatre heures. Il vient de pleuvoir à torrents. L’année dernière j’élais sûre de l’avoir et j’étais tracassée du retard de nouvėlles positives. Celte année, ce n’est pas sûr, je suis beaucoup plus calme ; il y a un an je devais l’avoir, mais je redoutais l’imprévu et ça me tourmentait fort. L’avoir tout en ne l’ayant pas, J’avoir pour le pastel me désespérait. A présent que je comprends combien ce pastel eșt beau, ça me fait plaisir. Gette année, c’est oui ou non, c’est très net. Si c’est oui, je le saurai ce soir vers huit heures. Je vais donc m’asseoir à fa turque dans le grand fauteuil qui est sous la fenêtre et regarder par cette fenêtre, accoudée au dossier du susdit fauteuil. Et ça pendant quatre heures !

Il est cinq heures vingt. Ce n’est pas que je sois beaucoup plus ennuyée que lorsque je reste à e rien faire sans rien allendre. Et puis cette huile qui a ranci mes fleurs. Quand j’ai vu ça, j’en ai eu le front en eau. Espérons que ça ne se verra pas trop… Dans deux heures, je saurai. Vous croyez peut-être que je suis très tourmentée. Non, je vous le dis, pas beaucoup plus que lorsqu’il m’arrive de passer une après-midi à ne rien faire, seule, énervée, Dans tous les cas les journaux de demain m’apprendront le résultat.

Je suis écrasée d’attente, brûlée et en eau avec un petit mal de téle.

M. B. — I, 47