Page:Basset - Contes arabes, 1883.djvu/86

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trône. » Ensuite il venait chaque jour prés de la citerne et lui criait : « Abou-Sâber, je ne vois pas que tu sortes du puits pour monter sur le trône. » Et il lui faisait donner deux pains. Le prisonnier demeurait silencieux et ne répondait pas ; mais il supportait avec constance ce qui lui arrivait23.

Le prince avait un frère que, longtemps auparavant, il avait fait enfermer dans ce caveau et qui y était mort ; mais les habitants du royaume le croyaient encore vivant. Trouvant sa captivité trop longue, les courtisans du roi murmurèrent à cause de la cruauté de leur maître : le bruit se répandit qu’il était un tyran. Un jour, le peuple se souleva contre lui, le tua, chercha le caveau et en tira Abou-Sâber qu’il prenait pour le frère du dernier souverain, car il lui ressemblait plus que personne, et il y avait longtemps qu’il y était enfermé. Dans cette pensée, on lui dit : « Te voilà à la place de ton frère ; nous l’avons tué ; c’est toi qui lui succèdes. » Abou-Sâber se tut, reconnaissant dans cet événement la récompense de sa patience. Il s’assit sur le trône, revêtit des vêtements royaux et fit preuve de justice