Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 1.djvu/151

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
115
1603. septembre.

comme nous eumes passé huit ou neuf cens pas, ils ne nous peurent plus endommager.

Monsieur le general retint aupres de luy Mr  le prince de Jainville et monsieur le landgraf avesques ses volontaires italiens : mais je m’estois desrobbé peu auparavant avesques huit ou dix gentilshommes françois, et m’allay mettre a la pointe gauche, au regiment du comte Casimir de Hoenloe, mon cousin, quy me fit l’honneur de me mettre a sa droitte, et ces gentilshommes au premier rang de son esquadron. Nous chargeames les premiers un gros de quelques mille chevaux turcs, et estions soutenus de deux mille chevaux, assavoir mille reitres du Colovich, et mille du comte Frederich de Hoenloe. Le colonel et moy, avesques ses officiers et les François que j’avois amenés, chargeames fort bien ; mais les cinq cens chevaux quy estoint arquebusiers reitres, n’en firent pas de mesme ; ains[1] faisant le caracol[2], chasque rang en deschargeant, ils montrerent le flanc aux Turcs quy les chargerent vivement, et nous eussent deffaits sy ces deux susdits esquadrons ne se fussent avancés, quy nous donnerent loysir de nous rallier, et de les charger de nouveau ; lesquels a cette seconde charge ne tindrent plus, et nous les menames battans jusques sur la rive du Danube, ou il s’en fit une terrible boucherie ; car en mesme temps l’aile droite de nostre armée avoit chargé et deffait l’aile gauche des Turcs.

  1. Ains, mais.
  2. La caracole est le mouvement de l’escadron qui tourne sur sa droite ou sur sa gauche, comme sur un pivot, pour faire volte-face et se remettre en bataille.