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journal de ma vie

jours de plus a la campagne, et le bourgrave de Carlestein nous convia, le Rosworm et moy, avec deux autres seigneurs, l’un nommé Slabato, et l’autre Colobrat[1], de le venir passer à Carlestein, ou quantité de dames et de seigneurs se devoint trouver aussy : ce que nous fismes des nostre mercredi des Cendres[2], et nous mismes tous quattre en carrosses, quy estions les quattre amoureux des quattre filles du bourgrave ; car Colobrat aymoit de longue main la comtesse Millesimo, et Slabato estoit depuis peu embarqué avec la femme de Hans Colovich[3]. Nous y trouvasmes plus de vingt dames, parmy lesquelles il y en avoit de tres belles : et ne faut pas demander sy nous fumes bien venus et veus des quattre filles du logis, mais principalement de la mienne, quy fut ravie de me voir, et moy elle ; car j’en estoís extremement amoureux, et puis dire qu’en toute ma vie je n’ay passé dix journées plus agreablement, ny ne les employay mieux que je fis celles la : ce fut une continuelle feste, estant perpetuellement a table, ou au bal, ou en sclitte[4], ou en une autre meilleure occupation.

En fin apres le carnaval passé, nous nous en revinmes a Prague, avec grand regret d’elles et de nous, mais avec grande satisfaction de nostre petit voyage. Ma maitresse me promit qu’elle viendroit bientost a

  1. Slavata, et Colowrat, seigneurs bohêmes.
  2. Le 3 mars.
  3. Ce Colowitz que Bassompierre appelle ici Hans (ou Jean), est celui qu’il a précédemment désigné sous le nom de Karl. Voy. p. 133.
  4. Schlitten, traineau.