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1611. janvier.

quy peuvent estre ses rois et ses maitres, et que cela l’offensoit ; et que, sy Mr de Guyse n’acquiesçoit aux choses qu’il avoit proposées pour l’accommodement de cette querelle, il se desclareroit ouvertement contre luy et pour Mr le Comte son oncle, ainsy que son devoir l’obligeoit s’il n’eut esté preoccupé par l’affection singuliere qu’il avoit pour Mr de Guyse ; et qu’il me prioit de luy rapporter ce qu’il m’avoit dit, et luy faire sçavoir de plus que, s’il s’estoit desclaré contre luy, les deux tiers de ceux quy l’assistoint se retireroint en mesme temps pour le venir trouver, comme ils luy avoint la plus part fait dire.

Je luy dis que j’estois venu le trouver seulement pour escouter ce qu’il luy plairoit de me dire, et le rapporter en suitte a Mr de Guyse en mesmes termes que je l’aurois entendu, a quoy je ne manquerois pas, m’offrant de plus de luy en venir rapporter la response ; et lors je me teus.

Mr le Prince, quy aime que l’on luy responde et conteste ses opinions, affin de les fortifier de raysons, comme c’est en verité le plus habile et capable prince que j’aie jammais pratiqué, me dit de plus : « Venés ça, Monsieur de Bassompierre ; n’ay-je pas rayson de mander cela a Mr de Guyse, et de me retirer de luy, et l’abandonner, s’il ne veut suivre mes conseils et avis, et garder le respect bienseant, et deu aux princes du sang ? »

« Monsieur, luy respondis je, personne ne vous peut donner conseil sans faire un acte d’arrogance et de presomption ; car vous estes sy habile et capable, qu’il ne se peut rien adjouster à ce que vous dittes, ou proposés. Neammoins, puis que vous me commandés