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journal de ma vie.

cesse que nostre siècle ait portée, me dit que je luy allasse dire de sa part qu’elle luy accordoit cette grace, mais qu’il la tint cachée, et que mesmes il ne l’en remerciat que par la bouche de madame la princesse sa sœur, et encores que ce fut lors quelle seroit seule avec elle. [Elle me dit en suitte que les ministres estoint tres bien avec elle][1], et que le lendemain dimanche, 13me de janvier, au matin, ils viendroint la trouver a neuf heures, tous trois.

En cet instant Mr  d’Espernon, et Zammet et Peronne, entrerent dans le cabinet de la reine, quy avoint demeuré quelque temps dans le petit, apres que la reine en fut sortie, pour ne point montrer qu’ils luy eussent parlé. La reine, d’abord, luy fit fort bonne chere, et luy dit que c’estoit merveille de le voir la le soir apres sa grande maladie, et qu’il falloit qu’il se conservat mieux. Il luy dit que, Dieu mercy, a ses jambes pres, il ne s’en sentoit plus. La reine luy fit donner un siege pres d’elle, et le convia a la comedie. Mr  le duc du Maine et le marquis d’Ancres entrerent cheux la reine en ce mesme temps, quy, voyant Mr  d’Espernon pres d’elle, et assis, n’en furent pas moins estonnés que de la mauvaise chere qu’elle leur fit. Ils s’approcherent de la table ou j’estois et me dirent : « Qu’est cecy ? Y a-il longtemps que Mr  d’Espernon est là ? » Je leur dis que ouy, et qu’elle luy avoit fait fort bon accueil, et qu’il me sembloit que c’estoint des fruits de la conference que nous avions veue a Luxembourg entre elle et le president Jannin. Ils me demanderent sy Mr  de Guyse

  1. Inédit.