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1613. janvier.

resvé : « Monsieur, vous me faites penser a une chose quy peut-estre est fausse, mais quy n’est pas aussy sans quelque fondement. La reine disoit hier du bien de Mr de Boullon, et montroit de l’affectionner, en mesme temps qu’elle montroit du desdain de Mr  le duc du Maine et de Mr  le marquis d’Ancres : madame la princesse de Conty me dit qu’elle[1] avoit voulu persuader a Mr  d’Espernon de vivre bien ensemble, et de quitter cette animosité que l’un avoit contre l’autre, ce quy avoit fait naitre quelque ombrage a madame la princesse de Conty que Mr  d’Espernon s’estoit reuny avesques vous, et que c’estoit par le moyen de la reine, veu la bonne chere extreordinaire qu’elle luy faisoit. Vous savés, Monsieur, que Mr  de Boullon est intime amy de Mr  de Villeroy : vous auroit-il point joué a la fausse compagnie, et s’estre tourné du costé de la reine et des ministres a vostre prejudice, voyant que la reine avoit sy mal pris vostre demande du Chasteau Trompette ? Vous auroit il point expres embarqué a cette demande, pour remettre bien les ministres, et luy avec eux ? Pour moy, je soubçonne tout de son esprit, et neammoins, peut estre je me trompe ; mais plusieurs divers discours descouvrent quelquefois une affaire bien cachée. »

Mr  le Prince est de son naturel fort soubçonneux et deffiant : il me dit qu’il ne sçavoit que dire de tout cecy, mais qu’il en estoit bien estonné, et que mon doutte n’estoit pas peut-estre hors de rayson. Il me dit la dessus : « Et de Mr  de Guyse, qu’est--

  1. La reine