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1620. octobre.

une fort favorable lettre du roy avec ordre de renvoyer l’armée aux garnisons qu’il luy avoit destinées, et par les routtes qu’il m’envoya[1].

Ce fait, nous partimes, Mr le mareschal et moy, le 21me, de Saint-Justin, et vinmes coucher a Catchicot, le 23me a Basas, et le 24me a Bordeaux.

Le roy y arriva le lendemain 25me, de quy j’attendois toute bonne reception : mais au contraire il ne me regarda pas ; dont je fus un peu estonné. Toutefois je m’approchay de luy et luy dis : « Sire, me faites vous la mine a bon escient, ou sy vous vous mocqués de moy ? » Il me dit froidement : « Non, je ne vous la fais point », et puis se retourna d’un autre costé.

Je ne pouvois m’imaginer d’ou me pouvoit venir cette froideur depuis ses favorables lettres et mon depart d’aupres de luy ; et estant allé saluer Mr de Luynes, il me receut sy froidement que je vis bien qu’il y avoit un grand changement pour moy. Je m’en revins neammoins a la galerie de l’archevesché ou estoit le roy, ou je n’eus gueres demeuré que Mrs le cardinal de Gondy[2], de Chomberg, et de Roucelay me tirerent a part et me dirent que Mr de Luynes se plaignoit infi-

  1. Le roi était entré le 15 à Pau ; le 17 il s’était porté à Navarreins, où il avait mis un gouverneur nouveau. Il rétablit les ecclésiastiques dans leurs anciens droits, restaura le culte catholique en Béarn, et supprima les milices nationales. Enfin le 20 furent publiées à Pau les lettres patentes du 18 portant réunion de la couronne de Navarre et de la souveraineté de Béarn à la couronne de France, et fusion des cours souveraines de ces deux pays en un seul parlement siégeant à Pau. Le roi partit de cette ville le même jour pour retourner à Bordeaux.
  2. C’est le même que le cardinal de Retz dont il a été déjà parlé. Voir sur lui la note à la page 155.