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journal de ma vie.

nous vast-on coffrer ? » Je luy dis : « Je ne le crois pas ; car je n’en sçay rien, et je serois infailliblement un des violons quy vous feroint danser sy cela estoit. » Pourquoy donc a-t-on pris les armes ? » me dit il. Je luy respondis : « Je les viens de faire prendre de moy mesme parce que le roy, apres vous avoir parlé, vient souper cheux Mr de Luxembourg. » Il me dit lors : « Nous courons grande fortune d’estre arrestés, et pour moy j’en ay grand peur, mais quoy qu’il arrive, promettés moy que vous serés mon amy et que vous m’assisterés de ce que vous pourrés, et sy vous me le promettés, je sçay que vous le ferés avesques autant de passion qu’aucun de mes enfans. » Je luy dis a l’heure les plus fortes parolles dont je me peus aviser pour l’en asseurer. En mesme temps ils furent delivrés de cette apprehension ; car le roy sortit et les mena soupper avec luy, ou il leur parla de tout ce qu’il desiroit d’eux quand il seroit hors de la province.

Le roy partit de Blayes le 30me et arriva la veille de la Toussaints a Saintes[1], ou il sejourna pour y faire ses pasques.

Novembre. — Le soir Mr de Rouccelay me vint trouver apres soupper et me dit pour finale resolution, que Mr de Luynes voudroit mon eslongnement toutes les fois que la moindre humeur luy prendroit contre moy, et peut estre des que nous arriverions a Paris ; mais qu’il ne le feroit que honorablement et

  1. Comme il a déjà été dit, le roi partit le 29 de Blaye pour Mirambeau ; il se rendit le 30 de Mirambeau à Pons, et le 31 de Pons à Saintes.