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journal de ma vie.

troit a me parler a une autre heure, laquelle il me feroit sçavoir, et me dit de plus : « Je me plais sy fort de voir vos Suisses que je vous prie de m’excuser sy je vous ay prié de les [faire][1] arrester affin que je les puisse voir », et sortit quand et moy les voir [entrer] et sortir de garde, ce quy me fit perdre le soubçon que j’avois pris que la reine se voulut saisir de ces messieurs. Ils s’en allerent peu apres a Challiot auquel lieu on leur donna quelque avis de prendre garde a eux, que les gensdarmes de la reine approchoint : mais ils creurent que c’estoit effectivement pour aller a Peronne. Neammoins ils s’aviserent comme ils avoint tous quattre esté le matin en belle prise et resolurent de ne se plus trouver tous quattre ensemble en lieu ou l’on leur peut mettre la main sur le collet.

Le soir Mr de Crequy fit un tres beau festin aux Anglois, d’ou nous nous retirames fort tard : et le lendemain jeudy premier jour de septembre, a trois heures du matin, je fus esveillé par un gentilhomme servant de la reine nommé la Motte[2] quy me vint dire de sa part que je la vinsse trouver au Louvre, desguysé et seul, ce que je fis, et en entrant je trouvay un des gardes du corps du roy nommé la Barre, quy estoit mareschal des logis des Suisses, quy estoit de paillasse[3] cette nuit la, auquel je dis qu’il vint avec moy en l’antichambre de la reine et qu’il m’attendit a la

  1. Inédit.
  2. Hector de la Motte, seigneur de Ville, fils de Claude de la Motte, seigneur de Ville, gentilhomme servant de la reine Catherine de Médicis, et de Marie de Ravenel.
  3. C’est-à-dire de garde de nuit.