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journal de ma vie.

donner l’assaut[1], et Mr le Prince eut peine de le retenir. Mr le mareschal de Pralain a quy le soir auparavant le roy avoit fait l’honneur de le faire lieutenant general de son armée sous Mr le Prince, en vint prendre possession, et commanda d’executer la batterie. Mais les sept canons, a la premiere volée qu’ils tirerent, renverserent la muraille quy estoit devant eux, de sorte que tous les officiers de l’artiglerie et les Suisses quy l’executoint, ne demeurerent pas seulement a la mercy des mousquetades ennemies, mais aussy monsieur le mareschal et nous tous. Ils tuerent ou blesserent en une heure une dousaine d’officiers, entre lesquels estoint le lieutenant de l’artiglerie, et vingt Suisses. Ce petit eschec nous fit mettre de l’eau dans nostre vin, et nous resoudre de remettre la partie au lendemain, et monsieur le mareschal le manda ainsy au roy par Mr de la Curée. Je consideray neammoins que tout le mal quy nous arrivoit ne venoit que de trois canonnieres du chasteau, et proposay a Mr de Chomberg d’y faire tirer deux volées de canon a chascune. Il me dit que pourveu que je fisse venir des Suisses pour executer les canons, qu’il le feroit. Allors je pris un lieutenant nommé Guibele[2], brave homme, et luy dis : « Vas moy querir quarante Suisses pour ayder a la batterie, et je leur donneray un escu chascun » ; ce qu’il fit promptement, et n’eusmes pas tiré six coups

  1. « Le 9, luete tres relaschée. — Le 10 va a la fenestre d’ou se void l’assault qui se donnoit à Negrepellisse. » (Journal d’Hérouard.)
  2. Peut-être Ours Gibelin, de Soleure, qui devint en 1623 lieutenant de la compagnie suisse de Wallier, dont il fut pourvu en 1639.