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journal de ma vie.

commanda de les aller faire cesser. Je descendis aux tranchées, et Mr  de Vandosme m’ayant dit qu’il me montreroit le chemin pour aller a la teste du travail, je luy dis que j’en sçavois un bien plus court, et montay a descouvert par dessus la tranchée, et y allay tout droit, dont il m’en pensa mal arriver ; car les ennemis s’affusterent de telle sorte a tirer contre moy que j’eus deux mousquetades, l’une quy me coupa mon baudrier et fit tomber mon espée, et l’autre quy me rompit mon baston, emporta ma manchette et perça ma manche, sans m’offenser autrement. Le roy me les vit donner quy m’escria de la redoutte ou il estoit que je me retirasse ; mais je passay outre et vins a la teste faire ce qu’il m’avoit commandé, puis retourna le trouver.

Le vendredy 17me l’on s’attacha a la corne, et le samedy le regiment de Normandie quy estoit de garde, y fit une attaque quy ne reussit pas.

Le dimanche 19me Mr  le Prince vint au camp et fit donner les gardes a la corne ; mais ils en furent encor repoussés. Le roy vint a sa redoutte d’en haut voir l’attaque, dont il fut fort mal satisfait[1] : j’y vins avec luy ; car durant tout ce siege je ne servis point. Mr  de Rets fut malheureusement blessé derriere le roy d’une balle mourante quy ne laissa pas de luy casser le genouil, dont il est demeuré estropié.

Comme le roy descendit la montagne, il rencontra Mr  le Prince avec Mr  de Vandosme, Mrs  les mareschaux de Pralain, de Temines et de Saint Geran, et Marillac,

  1. « Le 19 a une heure monte a cheval, va au camp ou il voit faire une attaque a une corne qui fut virilement soustenue et repoussée par les femmes a coups de halebardes : s’en revient fort fasché a neuf heures et ung quart. » (Journal d’Hérouard.)