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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 4.djvu/110

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1630. mai.

peut passer qu’un homme a la fois, qu’il ne se peut entreprendre que pendant que le soleil ne luit point parce qu’il est plein de neige quy ne tient point quand le soleil donne dessus, et qu’il faut monter deux lieues devant qu’estre au sommet ; c’est pourquoy on n’y avoit mis que soissante hommes par forme pour le garder, quy avoint esté tirés du regiment quy gardoit le col de Cormette quy n’est pas a mille pas de là, d’ou l'on l’eut peu secourir sy l’on eut aperceu que quelqu'un eut monté par celuy de la Lossa : mais Dieu voulut que La Melleraye arriva a l'entrée de la nuit, qu’une nuée le cacha aux yeux de ceux quy gardoint le col, quy ne laisserent qu’une sentinelle quy les laissa monter jusques a cinquante pas de luy sans les voir, et les nostres luy ayant tiré, il se sauva dans son corps de garde, et ceux du corps de garde s’en fuirent, de sorte que Mr de la Melleraye l’avoit occupé et me mandoit que je luy envoyasse en diligence le reste de son regiment et des vivres ; car il croyoit y devoir estre attaqué. La joye fit un exces en mon cœur a cette nouvelle, et a l’heure mesme je fis partir le regiment de la Melleraye pour aller joindre son mestre de camp auquel j’envoyay des vivres et l’asseuray que le jour suyvant je serois a luy avec toute mon infanterie.

Le samedy premier jour de juin je renvoyay toute ma cavalerie avec laquelle la plus grande partie de la noblesse s’en retourna, et fis acheminer sept mille hommes de pié quy me restoint, bien lestes, et sans bagage, au dessous du col de la Lossa et a la veue de La Melleraye, en une petite vallée nommée Olacheray. On me vint avant partir donner aussy avis que Le Plessis et Vignoles avec les hommes que je leur avois