Page:Bastié - Ailes ouvertes, 1937.pdf/77

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
63
MES « TRENTE-HUIT HEURES »

des bras et des jambes, nécessaires à la conduite, tout geste intempestif m’était interdit.

C’est pourtant là que j’allais passer 38 heures sans dormir, le cerveau surchauffé, l’oreille tendue sans cesse pour percevoir le moindre bruit suspect du moteur, la moindre vibration anormale.

La nuit à bord d’un avion est une chose à la fois redoutable et émouvante. Tout est mystère, incertitude, menace… On est toujours moins sûr de soi, plus livré à tant de forces ignorées, dispersées autour de cet audacieux volatile mécanique qui fonce dans l’ombre noire, éclairé par ses seuls appareils de bord lesquels font paraître, alentour, l’obscurité plus dense.

Tout paraît suspect aussi… Dans ce silence vivant et multiple, les sens sont décuplés : on entend des bruits mécaniques qu’on n’entendait pas auparavant et qui prennent une importance formidable et on épie son moteur avec une attention passionnée.

La première nuit passa tout de même assez