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RÉPONSE.


3 décembre 1849.

Monsieur, votre dernière lettre se termine par ces paroles :

« Le jour ou nous serons d’accord sur cette première donnée : l’intérêt du capital est légitime ; — je me ferai un plaisir et un devoir de discuter loyalement avec vous les autres questions que vous me posez. »

Je vais, monsieur, tâcher de vous donner satisfaction.

Mais permettez-moi d’abord de vous adresser cette question, que je voudrais pouvoir rendre moins brusque : Qu’êtes-vous venu faire à la Voix du Peuple ? — Réfuter la théorie de l’abolition de tout intérêt des capitaux, de toute rente de la Propriété.

Pourquoi donc refusez-vous de vous placer tout de suite sur le terrain de cette théorie ? de la suivre dans son principe, sa méthode, son développement ? d’examiner ce qui la constitue, les preuves de vérité qu’elle apporte, le sens des faits qu’elle cite, et qui contredisent, abrogent, d’une manière éclatante, le fait, ou plutôt la fiction que vous vous efforcez de soutenir de la productivité du capital ? Cela est-il d’une discussion sérieuse et loyale ? Depuis quand a-t-on vu les philosophes répondre à un système de philosophie par cette fin de non-recevoir : Mettons-nous premièrement d’accord sur le système en vogue, après quoi nous examinerons le nouveau ? Depuis quand est-il reçu dans les sciences que l’on doit repousser impitoyablement, par la question préalable, tout fait, toute idée, toute théorie qui contredit la théorie généralement admise ?

Quoi ! vous entreprenez de me réfuter et de me convaincre ; et puis, au lieu de saisir mon système corps à corps, vous me présentez le vôtre ! Pour me répondre, vous commencez par exiger que je tombe d’accord avec vous de ce que je nie positivement ! En vérité, n’aurais-je pas, dès ce moment, le droit de vous dire : Gardez votre théorie du prêt à intérêt, puisqu’elle vous agrée, et laissez-moi ma