Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/140

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CÉCILE.

Mon Pierre, mon pauvre Pierre !… C’est fini de nous deux !… Il y a huit jours que j’en étais sûre !…

(Elle s’écroule sur le canapé. La maison retentit de son gémissement.)
GINETTE, (criant avec elle.)

Pierre ! (Désespérément.) Mais ça n’est pas possible, ça n’est pas encore sûr, n’est-ce pas, Monsieur, dites ?… dites ?…

L’ENVOYÉ, (violemment ému.)

Madame, Mademoiselle, excusez-moi. J’étais loin de me douter en entrant ici… J’avais au moins l’espoir que vous étiez plus au courant que vous ne l’étiez en réalité. Je pensais que vous aviez reçu un avis dubitatif…

CÉCILE, (parlant à travers les incommensurables sanglots qui la secouent toute.)

De disparition, oui, c’est tout ! la mention : disparu…

GINETTE, (accrochée encore à une lueur d’espoir.)

Mais la preuve, Monsieur, la preuve, la possédez-vous ? (Enlaçant Cécile.) Je vous en supplie, avant de vous laisser abattre, attendez la certitude… Il y a des erreurs de ce genre tous les jours…

L’ENVOYÉ.

Je ne serais pas ici pour y apporter autre chose que des certitudes ! Mais, Madame, je me reprocherais toujours d’avoir été l’annonciateur de ce deuil héroïque si je ne laissais pas à votre douleur tout son premier cours… Elle veut le recueillement… la solitude…