Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/277

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je fais semblant de croire ! Mais je sais bien quel est le parti énergique que tu as pris ! Dans deux heures… c’est terrible !… dans deux heures nous allons être lancés comme des boulets, vers l’inconnu !…

DARTÈS.

Eh ! bien, tu te trompes !… Si tu pénétrais dans mon cœur, tu verrais que, véritablement, j’ai des hésitations… des envies d’envoyer tout promener !…

RENÉE.

Vrai ?… Ah ! si ce pouvait être vrai !… Si tu pouvais seulement hésiter !…

DARTÈS.

Eh bien ?

RENÉE.

Alors, à cette minute-ci… dont toute notre vie va dépendre… j’oserais élever la voix…

DARTÈS.

Fais-le, mon petit… Après tout, je t’y autorise.

RENÉE, (allant à lui.)

Père, je t’aime tant !… Je tremble !… J’ai peur ! Tu seras traîné dans la boue… calomnié… Et quelle lutte dorénavant ! Songe à l’existence qui va nous être enlevée tout à coup ! Tout ce que nous étions, l’un pour l’autre, depuis deux mois que je vis à tes côtés… que nous vivons dans cette communion de tous les instants !

DARTÈS.

Et quelle joie cela a été pour moi !… Nos promenades… nos soirées autour de cet abat-jour !… Ta façon de protéger ma vie, d’organiser les journées… de recevoir les amis…