Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 2, 1922.djvu/226

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je ne l’avais pas, là, sous la main, tout de suite, mon Dieu, mon Dieu… j’aimerais mieux mourir tout de suite ! Ah ! c’est que je la connais ! Elle est capable de recommencer demain… L’éloigner ? Quel crime ! Non, non, on ne passe pas deux fois par où je viens de passer !… L’horrible petite ! Elle a mis la mort entre nous.

GEORGES.

Je disais : éloignement… comme ça… sans rien préciser…

ISABELLE, se redressant et allant droit à lui.

Voyons, Georges, au lieu de nous réunir étroitement contre le malheur, il y a au contraire entre nous, depuis tout à l’heure, comme une hostilité réelle, comme si nous avions senti tout de suite que nous allions défendre différemment notre bonheur. Nous valons mieux que cela.

GEORGES, effondré.

Ah ! notre pauvre bonheur, parlons-en ! Quel cataclysme ! Qu’est-ce que nous allons faire maintenant ? Comment sortir de là ?

ISABELLE.

Vous le demandez ? Mais nous jeter à son secours ! La guérir ! La guérir ; tenter cela ! Et que voulez-vous que nous fassions d’autre maintenant ? Me séparer d’elle, une minute, du moins pour l’instant, n’y revenons plus, n’est-ce pas ? Je considère le petit voyage ou la maison de santé que vous m’offrez comme une monstruosité. Quelle réponse à son abnégation ! Pour l’instant je la garde… voilà ce que je sens. Après, on verra.

GEORGES.

Alors la prendre entre nous, avec nous, à Saint-Meilhan ?… Non non, je ne contredis pas, notez bien !… je vous demande simplement… je m’informe.

ISABELLE.

À moins que vous ne préfériez que nous nous disions adieu ?