Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 3, 1922.djvu/353

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IRÈNE, (bas à Mme  Ledoux, sans se retourner.)

Admirez comme mon visage n’a pas sourcillé… Et ce sera toujours pareil… toujours… je le jure par ce beau ciel… Ainsi, à ce moment, savez-vous ce qu’ils font ? Voulez-vous que je vous le dise ?

MADAME LEDOUX.

Oui.

(Georget et Miss Deacon se font des signes.)
IRÈNE, (toujours sans se retourner, pointant son doigt vers le ciel.)

Mais paraissez vivement intéressée par la lune… Ils se regardent longuement… sans rien dire… ils se pressent les mains, avec la peur, la délicieuse peur de moi… je le sens, j’en suis sûre… Ils font comme nous faisions, Georges et moi autrefois. C’est leur tour maintenant !… c’est de moi, maintenant, qu’on se cache… (Georges et Miss Deacon se sont rapprochés l’un de l’autre et se pressent la main.) Je souffre !… Je sens mes jambes flageoler et quelque chose de lourd qui m’étreint et qui fait si mal… si mal… Eh bien, je vais me retourner lentement, naturellement, en leur laissant tout le temps de se détacher et il ne paraîtra rien sur mon visage, rien que le sourire le plus parfait et l’indifférence la plus heureuse… regardez… (Elle se retourne très lentement, en sorte que Georget et la petite se sont détachés. Irène, avec un sourire exquis à miss Deacon.) Et ne changez surtout pas cette robe qui va si délicieusement avec le ton de vos cheveux et la couleur du soir. (Et avec le même sourire, elle se retourne