Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 4, 1922.djvu/303

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yeux. (Elle le fixe avec une autorité sévère, devant laquelle les yeux de Poliche se mettent à ciller. Il se détourne, en haussant les épaules, mais son angoisse se trahit.) Tu n’as pas besoin d’avoir peur de moi, va !… Justement, tu ne sais pas comme ça tombe à pic… Mais c’est délicieux, tout bonnement, et sa chère Rosinette ne lui pardonnera pas de n’avoir pas osé, comme un grand collégien qu’il est ! Dadais ! (Une tape sur la joue.) Et pourquoi, je vous demande un peu ?… Tu ne me crois donc pas de cœur, pas d’intelligence… Quand il nous arrivait de parler sérieusement de la vie, quand tu me donnais des conseils, en vrai ami, ne me sentais-tu pas plus proche de toi ? Non, tu ne le sentais pas ? (Elle s’est mise contre lui, sur la chaise longue. Et, pendant qu’elle lui passe sous le nez ses bras parfumés, son œil l’observe, avec une attention cachée extraordinaire.) Eh bien, voyez comme il est bête, ce gros garçon-là… Justement il se trompait du tout au tout… Ce qui m’a un peu éloignée de toi, c’est l’excès de ta blague. Alors que ce que j’aurais le plus désiré, le plus, de toi, c’était de l’amour !…

POLICHE.

Ne te fiche donc pas de moi… Allons ! allons !

ROSINE.

Parfaitement, de l’amour, de l’affection de tous les instants. Je te reprochais d’être sec, insensible, et tes facéties continuelles m’assommaient parfois !… Eh bien, puisqu’il en est ainsi, que tu es autre que tu le montrais, je ne demande pas mieux que de me mettre tout à fait en ménage avec toi…