Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 5, 1922.djvu/176

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dans un rêve, me dire ces choses… ces choses épouvantables… C’est comme une condamnation à mort qui tombe autour de moi. C’est toi, Pierre, qui parles ainsi, toi que j’entends dire : « Va-t’en vivre ! » avec la même voix qui me disait jadis : « Mon petiot ! mon petiot !… » Vivre ? Ah ! c’est commode à dire, on voit bien que vous ne savez pas ce que c’est !… Comment voulez-vous que je vive, maintenant, avec la poitrine crevée…

LA PRINCESSE, (vivement, et faisant signe à Bernier de lui laisser la parole.)

Mon plus vif désir est de réparer, dans la mesure du possible, le tort que je vous fais, de vous assurer une vie parfaitement convenable, digne de vous, et dans une mesure que votre mari ne saurait atteindre. Et ce ne sera là, je le reconnais, qu’une bien faible compensation.

LOLETTE.

La charité, maintenant ! Votre charité, c’est vrai !… Il faudra que j’aie la honte de l’accepter… sans quoi, je n’ai plus qu’à aller claquer sur une paillasse ! Il y a encore cette solution.

LA PRINCESSE.

Mon offre, telle que je la conçois, ne pourra pas s’appeler une charité. Croyez qu’elle dépassera de beaucoup ce qu’on appelle généralement de ce nom.

LOLETTE.

Mais je l’espère bien !… Vous me prenez tout, et vous ne me feriez pas ce qu’on appelle une situation ! De l’argent ? je vous crois, il m’en faut… et beaucoup encore !… Vous êtes riche, vous…