Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 5, 1922.djvu/48

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LAFARGUE.

Et les vierges des primitifs ?… Regarde Botticelli, Vinci.

GRÉVILLE.

C’est les pires !… Elles sont contre nature… Je ne leur confierais pas ma fille pour tout l’or du monde…

DUMAS.

Et les petites demoiselles de Greuze ?… Alors, pas chastes, peut-être ?

GRÉVILLE.

Pff !… Des raccrocheuses… De fausses mineures pour vieux messieurs. Allons donc… des blagues, tout ça… de la littérature !… Mais, nom de Dieu, les vierges de Raphaël, elles ont le sein plein de lait et les yeux pleins de culot. Ça vous fixe un homme à quinze pas ! Et les garces du Titien ?… je les mets au défi de résister deux minutes à un beau guerrier qui passe.

ROUSSEL, (de loin.)

Ah ! zut ! vous n’allez pas parler de peinture… Il me semble que je dîne chez Madeleine Lemaire.

GRÉVILLE, (continuant.)

Les peintres, nous peignons ce que nous avons sous les yeux… et voilà tout… Oui, nous ne sommes pas des littérateurs !… Ça m’écœure de voir ce vieil hypocrite de Certin appeler sa mélasse : « Vierge aux couronnes ». Et j’embrasserais Bernier pour avoir peint naïvement, avec le pouce, avec le pied, avec sa pipe, une femme à poil et pour n’avoir même pas su donner un titre à son derrière… (Interpellant Bernier qui arrive avec Chaillard