Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 7, 1922.djvu/178

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THYRA, (murmurante.)

Vous ne savez pas ce que vous faites ! Je vous en supplie, allez-vous-en !… Plus tard… peut-être… qui sait !…

PHILIPPE, (se rapprochant.)

Non, maintenant. Je viens de comprendre, pauvre petite, que ton acte n’était pas vil et qu’en te pressant dans mes bras, je vais maintenant seulement lui donner sa réalité !

THYRA.

Ayez pitié de moi ! Depuis ce matin je vis dans un cauchemar ! Je vis comme une folle subite qui a traversé des pays qu’elle ne connaissait pas… Songez donc que, depuis hier, j’ai fait connaissance de ces deux vertiges terribles : la mort et l’amour ! Ils se sont emparés de moi. Ils m’ont bouleversé le corps et l’âme ! Je vis dans une sorte d’ahurissement éperdu ! Ils m’ont meurtrie, je suis leur proie ! Et voici que j’entends au-dessus de ma tête, tout à coup, au bout du rêve, au bout du voyage, votre voix… votre adorable voix qui me parle de ces deux choses, d’elles toujours… toujours d’elles… l’amour et la mort, la mort et l’amour !

PHILIPPE.

Non, l’amour seul, l’amour triomphant de tout !… même de la mort !

THYRA.

Eh bien, mon cher amour, êtes-vous si cruel ? Oh ! restez là-haut, là-bas !… loin… J’aime mieux vous avoir loin pour toujours !… Pas vous… Éteignez ce désir que je viens d’exaspérer stupide-