Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/33

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MAURICE, (avec précaution.)

Raymond, ne crois-tu pas qu’il vaudrait peut-être mieux, pour faciliter, que nous prenions l’habitude de ne plus nous tutoyer du tout ?

RAYMOND.

Quoi ? Tu voudrais que je t’appelle « Monsieur », entre nous deux, quand nous sommes seuls ? Ah ! ça, je t’avertis que je ne pourrai jamais !… Je te vois venir, tu rougis de tutoyer le maître d’hôtel de ta mère !…

MAURICE, (tout de suite.)

Mais non, mon vieux, mais non.

RAYMOND.

Allons donc, je vois bien. Il y a déjà plus d’un an que ça t’embête. D’abord je te ferai observer que je ne t’ai jamais manqué de respect devant personne. Ou alors il ne fallait pas qu’on te garde pendant tant d’années avec nous, à l’office ; c’est une affaire de cœur. Si tu ne le comprends pas, c’est malheureux pour toi ! Est-ce que tout petit, quand on te cachait des journées entières, ce n’est pas moi qui te faisais ta vie, pas moi qui te promenais au Jardin d’Acclimatation, qui te réservais les meilleurs morceaux de la table ?

MAURICE, (battant en retraite.)

Mais oui, bien sûr.

RAYMOND.

C’est pas ta mère qui t’a soigné pendant ta typhoïde, n’est-ce pas ?

MAURICE.

Mais, mon vieux Raymond.