Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/31

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On appelle cet art stérile, infécond ou non productif par opposition à l’art fécond ou productif, parcequ’en effet il s’exerce sur les productions naturelles, non pour aider et pour augmenter leur fécondité ; non pour qu’elles se reproduisent et se multiplient, mais au contraire pour les rendre elles-mêmes prochainement et immédiatement utiles aux jouissances des hommes, aux dépens de cette même fécondité, qui périt sous la main de l’art stérile.

Les arts non productifs, bien loin d’être inutiles, font dans les États policés le charme et le soutien de la vie, la conservation et le bien-être de l’espèce humaine.

[9] La plupart même de ces arts stériles exigent beaucoup d’esprit naturel et de science acquise, pour les exercer comme ils le sont dans les grands empires florissants.

Ce n’est donc pas pour déprécier ou avilir cette espèce d’industrie très utile, très nécessaire, qu’il faut distinguer l’art fécond ou productif de l’art stérile, ou non productif. C’est qu’en effet l’un prépare et augmente la fécondité de la nature et de ses productions, l’autre se contente d’en profiter. L’un s’occupe des productions futures pour en procurer la naissance, l’autre ne s’occupe que des productions déjà nées pour en préparer la jouissance ou la consommation.

Dans les grands États policés, où presque tout le sol est cultivé, il n’existe que très peu de productions spontanées. C’est-à dire, de productions qui naissent d’elles-mêmes, sans aucun travail hu[10]main préparatoire. Presque toute récolte est donc effet subséquent du travail fait par quelqu’un des arts féconds, ou productifs.

Mais aussi, dans ces empires florissants, comme il n’est que très peu de productions naturelles employées dans leur état brut ou de simplicité primitive, presque toute récolte est la cause antérieure du travail à faire par quelques-uns des arts stériles ou non productifs.

Je le répete, en finissant, stériles par opposition à l’art fécond, mais non par opposition à utiles, comme quelques-uns seroient tentés de le croire ; car au contraire ces arts sont dans un État policé d’une très grande utilité, d’une très grande nécessité. Les productions qu’ils employent servent immédiatement aux jouissances qui font la conservation et le bien être des hommes. Elles y contribuent tant par leurs qua[11]lités naturelles, que par les formes qu’elles ont acquises.