Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/62

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les mandataires de la souveraineté, qui doivent être payés pour tous les travaux indispensables de cet art social, ont droit et intérêt d’empêcher ces jouissances, et d’en détruire les objets.

Voilà le principe tacite des taxes ou accises qui désolent depuis vingt siécles toute notre Europe.

Donc au contraire ces coopérateurs de la souveraineté devroient s’attribuer une portion de ces objets, sans altérer [92] la masse, sans la détruire, sans l’empêcher de croître : c’est la conséquence bien naturelle et bien légitime de ce principe incontestable, c’est celle qu’en tire la philosophie économique.

Donc toute perception, qui par son excès ou par sa mauvaise forme, empêche, détruit, anneantit les jouissances, est un délit[1], c’est-à-dire, une folie, une injustice, et tôt ou tard une cause de préjudices énormes pour celui même qui le commet.

C’est la conséquence ultérieure du même principe, elle emporte évidemment la réprobation de toutes les taxes, accises et autres perceptions de cette [93] sorte empêchante et destructive, qui prive les individus et le général même, d’une certaine somme de jouissances.

L’oubli trop long, trop universel de ces verités salutaires a multiplié dans l’Europe moderne les formes les plus pernicieuses de percevoir la portion de subsistances et de matieres premieres, attribuée aux coopérateurs de l’autorité souveraine, ou ce qui revient au même, de percevoir l’argent, qui est le titre et le gage de cette recette ou de cette attribution.

C’est delà qu’est né cet art si compliqué de la fiscalité, art que les nations modernes ont emprunté, comme beaucoup d’autres erreurs, de deux petits peuples, que le talent d’écrire des livres élégants, a rendu célebres pour le malheur de l’humanité ; c’est-à-dire, des bourgeois d’Athenes et de Rome, déprédateurs avides et cruels de cent Provinces, qu’ils ravagerent moins par leurs [94] armes quand ils voulurent les conquérir, que par leurs publicains quand ils les eurent usurpées ; art dont les principes constitutifs et fondamentaux sont profondément ignorés par ceux qui l’approuvent, qui l’enseignent et qui le pratiquent, ignorance qui

  1. Que l’on se rappelle la définition du mot de délit, que nous avons donné plus haut, nos Lecteurs ne perdront point de vue que nous envisageons ici l’ordre naturel, et que par conséquent nous devons inculper sans façon comme faute tout ce qui l’altère comme obstacle ou préjudice.