Page:Baudelaire - Œuvres posthumes, I, Conard, 1939.djvu/224

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Une réforme à l’académie


Le grand article de M. Sainte-Beuve sur les prochaines élections de l’Académie a été un véritable événement. Il eût été fort intéressant pour un profane, un nouveau Diable boiteux, d’assister à la séance académique du jeudi qui a suivi la publication de ce curieux manifeste. M. Sainte-Beuve attire sur lui toutes les rancunes de ce parti politique, doctrinaire, orléaniste, aujourd’hui religieux par esprit d’opposition, disons simplement : hypocrite, qui veut remplir l’Institut de ses créatures préférées et transformer le sanctuaire des Muses en un parlement de mécontents ; "les hommes d’État sans ouvrage", comme les appelle dédaigneusement un autre académicien qui, bien qu’il soit d’assez bonne naissance, est, littérairement parlant, le fils de ses œuvres. La puissance des intrigants date de loin ; car Charles Nodier, il y a déjà longtemps, s’adressant à celui auquel nous faisons allusion, le suppliait de se présenter et de prêter à ses amis l’autorité de son nom pour déjouer la conspiration du parti doctrinaire, "de ces politiques qui viennent honteusement voler un fauteuil dû à quelque pauvre homme de lettres".

M. Sainte-Beuve, qui, dans tout son courageux article, ne cache pas trop la mauvaise humeur d’un vieil homme de lettres contre les princes, les grands seigneurs et les politiquailleurs, ne lâche cependant qu’à la fin l’écluse à toute sa bile concentrée : "Etre menacé de ne plus sortir d’une