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Page:Baudelaire - Œuvres posthumes, I, Conard, 1939.djvu/325

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… Le titre de sa gloire, l’essai et tout ensemble le trophée de son génie, c’est la Pharsale, ouvrage que des beautés supérieures ont protégé contre d’énormes défauts. Stace, qui, nous l’avons dit, a célébré la muse jeune et brillante de Lucain et sa mort prématurée, n’hésite point à placer la Pharsale au-dessus des Métamorphoses d’Ovide, et presque à côté de Virgile. Quintilien, juge plus éclairé, reconnaît dans Lucain un génie hardi, élevé, et l’admet au rang des orateurs plutôt que des poètes : distinction que lui inspiraient le nombre et l’éclat des discours semés dans le récit de Lucain, et où sont exagérés trop souvent les défauts mêmes attachés à sa manière…

Les écrivains français l’ont jugé diversement. Corneille l’a aimé jusqu’à l’enthousiasme. Boileau l’approuvait peu, et lui imputait à la fois ses propres défauts et ceux de Brébeuf, son emphatique interprète.

En dépit des hyperboles et des raisonnements de Marmontel, la Pharsale ne saurait être mise au rang des belles productions de la muse épique. Le jugement des siècles est sans appel.

Rapports académiques

Ce qu’il y a d’amusant (mot bizarre à propos de Villemain) dans les rapports académiques, c’est l’étonnante conformité du style baveux, melliflue, avec les noms des concurrents récompensés et le choix des sujets. On y trouve l’Algérie ou la civilisation conquérante, la Colonie de Mettray, la Découverte de la vapeur, sujets lyriques proposés par l’Académie et d’une nature essentiellement excitante.

On y trouve aussi des phrases de cette nature : "Ce livre est une bonne œuvre pour les âmes", à propos d’un roman composé par un ministre protestant. Pouah !

On rencontre, parmi les couronnés, le nom de ce pauvre M. Caro, qui ne prendra jamais, je l’espère, pour épigraphe de ses compositions académiques ce mot de saint Jean : "Et verbum caro factum est", car lui et le verbe me semblent passablement brouillés.

On se heurte à des phrases comme celle-ci, qui représente