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de surprise ; de l’adaptation du style au sujet ; de la vanité et du danger de l’inspiration, etc., etc. ; mais j’ai eu l’imprudence de lire ce matin quelques feuilles publiques ; soudain, une indolence, du poids de vingt atmosphères, s’est abattue sur moi, et je me suis arrêté devant l’épouvantable inutilité d’expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit. Ceux qui savent me devinent, et pour ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas me comprendre, j’amoncellerais sans fruit les explications.

C. B.


[Deuxième version.]

[À fondre peut-être avec d’anciennes notes.]

S’il y a quelque gloire à n’être pas compris, ou à ne l’être que très peu, je peux dire sans vanterie que, par ce petit livre, je l’ai acquise et méritée d’un seul coup. Offert plusieurs fois de suite à divers éditeurs qui le repoussaient avec horreur, poursuivi et mutilé, en 1857, par suite d’un malentendu fort bizarre, lentement rajeuni, accru et fortifié pendant quelques années de silence, disparu de nouveau, grâce à mon insouciance, ce produit discordant de la Muse des derniers jours, encore avivé par quelques nouvelles touches violentes, ose affronter aujourd’hui, pour la troisième fois[1], le soleil de la sottise.

Ce n’est pas ma faute ; c’est celle d’un éditeur insistant qui se croit assez fort pour braver le dégoût public. « Ce livre restera sur toute votre vie comme

  1. Ce passage donnerait à penser que cette « deuxième version » était destinée à préfacer non la 2e édition des Fleurs, mais une troisième dont, après la mort du poète, on trouva le projet arrêté dans ses notes.