TRAVAUX SUR EDGAR POE
EDGAR ALLAN POE, SA VIE ET SES OUVRAGES[1]
I
Il y a des destinées fatales ; il existe dans la littérature de chaque pays des hommes qui portent le mot guignon écrit en caractères mystérieux dans les plis sinueux de leurs fronts. Il y a quelque temps, on amenait devant les tribunaux un malheureux qui avait sur le front un tatouage singulier : pas de chance. Il portait ainsi partout avec lui l’étiquette de sa vie, comme un livre son titre, et l’interrogatoire prouva que son existence s’était conformée à son écriteau. Dans l’histoire littéraire, il y a des fortunes analogues. On dirait que l’Ange aveugle de l’expiation s’est emparé de certains hommes, et les fouette à tour de bras pour l’édification des autres. Cependant, vous parcourez attentivement leur vie, et vous leur trouvez des talents, des vertus, de la grâce. La société les frappe d’un
- ↑ Revue de Paris, mars et avril 1852. Les notes auxquelles nous renvoyons par un astérisque sont de Baudelaire.