LETTRE AU FIGARO
[En réponse à un article de Jean Rousseau : les Hommes de demain. I. M. Charles Baudelaire.]
19 Juin 1858
Monsieur,
Le Figaro du 6 Juin contient un article (Les Hommes de demain) où je lis : "Le sieur Baudelaire aurait dit en entendant le nom de l’auteur des Contemplations : — Hugo ! qui ça, Hugo ? Est-ce qu’on connaît ça… Hugo ?"
M. Victor Hugo est si haut placé qu’il n’a aucun besoin de l’admiration d’un tel ou d’un tel ; mais un propos qui, dans la bouche du premier venu, serait une preuve de stupidité devient une monstruosité impossible dans la mienne.
Plus loin, l’auteur de l’article complète son insinuation : "Le sieur Baudelaire passe maintenant sa vie à dire du mal du romantisme et à vilipender les Jeunes-France. On devine le mobile de cette mauvaise action ; c’est l’orgueil du Jovard d’autrefois qui pousse le Baudelaire d’aujourd’hui à renier ses maîtres ; mais il suffisait de mettre son drapeau dans sa poche, quelle nécessité de cracher dessus ?"
Dans un français plus simple, cela veut dire : "M. Charles Baudelaire est un ingrat qui diffame