Page:Baudelaire - Œuvres posthumes 1908.djvu/97

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d’Aurevilly, vous ne vaudrez même plus assez pour être idolâtres.

Le stoïcisme, religion qui n’a qu’un sacrement : le suicide !

Concevoir un canevas pour une bouffonnerie lyrique ou féerique, pour pantomime, et traduire cela en un roman sérieux. Noyer le tout dans une atmosphère anormale et songeuse, — dans l’atmosphère des grands jours. Que ce soit quelque chose de berçant, — et même de serein dans la passion. — Régions de la Poésie pure.

*

Ému au contact de ces voluptés qui ressemblaient à des souvenirs, attendri par la pensée d’un passé mal rempli, de tant de fautes, de tant de querelles, de tant de choses à se cacher réciproquement, il se mit à pleurer ; et ses larmes chaudes coulèrent, dans les ténèbres, sur l’épaule nue de sa chère et toujours attirante maîtresse. Elle tressaillit, elle se sentit, elle aussi, attendrie et remuée. Les ténèbres rassuraient sa vanité et son dandysme de femme froide. Ces deux êtres déchus, mais souffrant encore de leur reste de noblesse, s’enlacèrent spontanément, confondant, dans la pluie de leurs larmes et de leurs baisers, les tristesses de leur passé avec leurs espérances bien incertaines d’avenir. Il est présumable que jamais, pour eux, la volupté ne fut si douce que dans cette nuit de mélancolie et de charité ; — volupté saturée de douleur et de remords.

À travers la noirceur de la nuit, il avait regardé derrière lui dans les années profondes, puis il s’é-