Page:Baudelaire - Curiosités esthétiques 1868.djvu/109

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accoutumée du génie. — Dans ceux du premier, il n’y a rien à deviner ; car il prend tant de plaisir à montrer son adresse, qu’il n’omet pas un brin d’herbe ni un reflet de réverbère. — Le second ouvre dans les siens de profondes avenues à l’imagination la plus voyageuse. — Le premier jouit d’une certaine tranquillité, disons mieux, d’un certain égoïsme de spectateur, qui fait planer sur toute sa poésie je ne sais quelle froideur et quelle modération, — que la passion tenace et bilieuse du second, aux prises avec les patiences du métier, ne lui permet pas toujours de garder. — L’un commence par le détail, l’autre par l’intelligence intime du sujet ; d’où il arrive que celui-ci n’en prend que la peau, et que l’autre en arrache les entrailles. Trop matériel, trop attentif aux superficies de la nature, M. Victor Hugo est devenu un peintre en poésie ; Delacroix, toujours respectueux de son idéal, est souvent, à son insu, un poëte en peinture.

Quant au second préjugé, le préjugé du hasard, il n’a pas plus de valeur que le premier. — Rien n’est plus impertinent ni plus bête que de parler à un grand artiste, érudit et penseur comme Delacroix, des obligations qu’il peut avoir au dieu du hasard. Cela fait tout simplement hausser les épaules de pitié. Il n’y a pas de hasard dans l’art, non plus qu’en mécanique. Une chose heureusement trouvée est la simple consé-

    combinée avec le gnóti séaution, mais la science modeste laissant le beau rôle au tempérament.