pas menti comme quelques idoles ingrates que nous avons portées dans nos panthéons. M. Delacroix n’est pas encore de l’Académie, mais il en fait partie moralement ; dès longtemps il a tout dit, dit tout ce qu’il faut pour être le premier — c’est convenu ; — il ne lui reste plus — prodigieux tour de force d’un génie sans cesse en quête du neuf — qu’à progresser dans la voie du bien — où il a toujours marché.
M. Delacroix a envoyé cette année quatre tableaux :
1o La madeleine dans le désert
C’est une tête de femme renversée dans un cadre très-étroit. À droite dans le haut, un petit bout de ciel ou de rocher — quelque chose de bleu ; — les yeux de la Madeleine sont fermés, la bouche est molle et languissante, les cheveux épars. Nul, à moins de la voir, ne peut imaginer ce que l’artiste a mis de poésie intime, mystérieuse et romantique dans cette simple tête. Elle est peinte presque par hachures comme beaucoup de peintures de M. Delacroix ; les tons, loin d’être éclatants ou intenses, sont très-doux et très-modérés ; l’aspect est presque gris, mais d’une harmonie parfaite. Ce tableau nous démontre une vérité soupçonnée depuis longtemps et plus claire encore dans un autre tableau dont nous parlerons tout à l’heure ; c’est que M. Delacroix est plus fort que jamais, et dans une voie de progrès sans cesse renaissante, c’est-à-dire qu’il est plus que jamais harmoniste.